“Un paradis! Et moi j’en fus chassé. Alors mes larmes, de ce paradis-là, fleuve je les appellerais si elles n’étaient pas amères”.
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Palerme, ville aux nombreux visages, richissime en art, noyée dans une nature généreuse, fermée dans l’enceinte de monts majestueux, au centre de la célèbre “Conca d’Oro” fut appelée par les Phéniciens, premiers à l’époque historique à témoigner leur présence sur le territoire, “Ziz” c’est-à-dire “Fleur” et, aux époques suivantes, elle fut appelée “Heureuse” pour son climat fort doux et salubre et ses jardins opulents et luxuriants.
Palerme et toute la pointe occidentale de l’île, avec les autres centres fondés par les Phéniciens, Solunto sur la côte tyrrhénienne et l’île de Motyé, sur la côte méridionale, fut à partir du VIII’ siècle. l’une des principales bases commerciales pour l’échange avec les peuples Sicanes, élymes et grecs, déjà présents sur ces territoires, en fixant cette domination côtière stratégique qui assurait le monopole des trafics maritimes dans la Méditerranée occidentale, de la côte africaine, à la Sardaigne et avec la péninsule ibérique. |
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L’agglomération phénicienne se développe rapidement, avec un premier noyau fortifié ceinturé de murailles qui constitue le centre d’habitation, la “Paleapoli” et successivement, au IVe siècle. av. j.-C. s’étendant vers la mer, la “Neapolis”, le long des bords de l’escale portuaire connue avec l’étymon grec “Panormos”, même si la ville ne fut jamais dominée par les Hellènes. Après la bataille d’Himère de 480 av. J-c. entre les villes grecques de Sicile et les Carthaginois, la ville s’imposa en tant que principale station de forces navales punique, et fut conquise par les Romains, dont elle devint un florissant “Municipia” siège du questeur, avec un sénat de cent citoyens. Les invasions barbares, consécutives à la dissolution de l’Empire romain d’Occident, secouèrent violemment la ville et toute la Sicile. D’abord les Vandales de Genséric et puis Odoacre conquièrent la ville, en répandant deuils et dévastations, en dépouillant la population désarmée. En 491 elle fut occupée par Théodoric qui la domina jusqu’en 535, lorsque le général Bélisaire conquiert la Sicile, en la mettant sous la domination de Byzance. Les Byzantins établirent la capitale de leur pouvoir à Syracuse et la ville de Palerme fut privée de beaucoup de fonctions politiques et administratives. La longue domination byzantine, durée presque trois siècles, jusqu’à l’invasion sarrasine de 831 ne contribue pas au développement économique de Palerme. Le seul événement digne d’attention fut l’élection à Pontife romain de quatre siciliens, dont le dernier Serge I’ (687-701), né à Palerme d’une famille émigrée en Sicile d’Antioche. Sous les Arabes Palerme, par sa position géographique, devient le centre le plus important de l’île et son port l’un des centres commerciaux les plus fréquentés de la Méditerranée. Dès 948, la ville est élue capitale de l’émirat sicilien qui est en train de se constituer. Commence alors pour Palerme sa destinée de ville cosmopolite, les chroniqueurs arabes de l’époque nous la décrivent comme une ville riche en quartiers nouveaux, embellis de demeures somptueuses, de mosquées, où arrivent de toute la Méditerranée des marchandises précieuses, étalées dans les marchés bondés. Toutefois ces descriptions ne sont pas témoignées par de consistants restes architecturaux de facture islamique, si ce n’est d’éphémères traces englobées dans l’ensemble de l’édifice religieux de Saint jean des ermites. Au cours du XI siècle commence l’inexorable déclin de la puissance islamique dans la Méditerranée centre occidentale qui se terminera dans l’île par la conquête normande.
En 1071 Robert Guiscard assiège Palerme, par la terre et par la mer
pendant cinq mois, et il accepte la capitulation des habitants par la reconnaissance de son autorité, en accordant une certaine autonomie et la liberté de culte.
Palerme, comme à l’époque de la domination islamique, devient le centre du pouvoir normand et pour toute la Sicile allait commencer une période de progrès fécond
et prospère dans tous les domaines de la vie civile. On reconstruit ou l’on re-consacre les temples chrétiens abandonnés ou transformés en mosquées par les
musulmans. On élève de nouveaux splendides édifices religieux Saint jean des ermites, la Magione, Saint jean des lépreux, Sainte-marie de l’Amiral, S. Spirito et la
Cathédrale. Tous ces travaux de restauration et de reconstruction, sont entrepris par volonté de Roger II premier roi de Sicile, dont le royaume par conquête ou
hérédité, s’étendait jusqu’aux États Pontificaux, du fleuve Tronto au fleuve Garigliano et il voulut orgueilleusement se proclamer “Rex Siciliae et ltaliae”.
Même la construction civile eut une impulsion vigoureuse. On éleva de superbes palais la “Zisa” (splendide en arabe), la Cuba, Aitarello di Baida, le château de
Maredolce et le superbe palais royal, le Palais des Normands, auquel il voulut donner l’empreinte de sa forte personnalité de Viking. Le Roi le créa susceptible de
représenter son pouvoir et la puissance unie à la perspicacité et à la sagacité des grands gouvernants de l’état, en se servant pour les travaux des grandes
traditions artistiques des trois groupes ethniques qui cohabitent dans l’île les Latino-Sicules, les grecs et les musulmans, en faisant naître et en donnant de la
vigueur à cet art “siculo-normand” auquel on doit les monuments artistiques les plus célèbres de Sicile. il serait suffisant de voir la Chapelle Palatine, pour
comprendre le poignant rêve de gloire offert par ce roi normand au Tout-Puissant. Il entreprit les travaux de ce splendide monument unique au monde, le jour de son
couronnement à Roi de Sicile, le jour de Noél de 1131. Un autre célèbre monument, voulu par Roger, c’est la Cathédrale de Cefalù, fondée par le Roi en 1131 et
destinée, selon ses intentions, à être le panthéon de la dynastie normande.
Les successeurs de Roger, poursuivant les travaux entrepris par leur aïeul qui ne se limitait pas à ériger des monuments religieux ou de somptueux palais, mais
pendant ce temps, à ces structures matérielles s’unissait l’affermissement de l’autorité royale et de l’autorité religieuse dans une Sicile profondément
islamisée, par la longue domination musulmane, avec l’unité du pouvoir politique et religieux. C’est le troisième souverain de la dynastie normande, Guillaume II
le bon (1153-1189) qui élève sur les premières pentes des collines au centre du grandiose amphithéâtre de la “Conca d’Oro”, le temple le plus beau du monde, le
Dôme de Monreale. La dynastie normande s’éteint à la mort de Guillaume II, en 1189 à l’âge de 36 ans seulement, ne laissant aucun héritier mâle. L’héritière
légitime était Constance, fille posthume de Roger II, que Guillaume maria au fils de Frédéric 1er Barberousse Henri Hohenstaufen, roi de Germanie et futur
empereur Henri IV, qui descendra en Sicile pour s’attribuer les droits régaliens, en donnant, pendant son bref règne, l’exemple d’une cruelle et mauvaise
administration entraînant une insurrection, noyée de façon barbare dans le sang. À la mort d’Henri IV, en 1197, suit, une année plus tard, celle de Constance, et c’est
leur fils Frédéric qui succède sur le trône de Sicile. À la cour Souabe de ce grand souverain, Palerme connaît une période exceptionnelle de grande valeur
culturelle et scientifique, de grandioses projets de construction et de réaménagement urbain c’est le commencement d’une nouvelle ère tendant à former une
nouvelle unité morale et politique dans les consciences des gens de Sicile.
En 1266, par la mort de Frédéric II, commence à Palerme et dans toute la Sicile, une période de luttes pour la succession qui marque, sous Charles d’Anjou, le
début de la domination angevine oppressive et obscurantiste. Les abus des nobles français, descendus en Sicile à la suite du souverain, sont à l’origine de la
révolte du peuple palermitain, connue comme “Les Vêpres Siciliennes” qui gagna aussitôt toute l’île, en mettant fin à l’exécrée domination angevine.
À Charles d’Anjou succéda l’Espagnol Pierre d’Aragon, souverain à plusieurs égards éclairé. Dans la Région, commence l’époque féodale, politiquement
tourmentée par les luttes entre les puissantes familles de barons. A Palerme le pouvoir était aux mains des Chiaramonte et des Sclafani qui élèvent leurs demeures
dans ce style dit “chiaramontano”, des constructions imitant le gothique aux influences arabo-normandes, dont les exemples à Palerme sont le “Steri”, le palais
de la famille Chiaramonte et le palais des Sclafani. Au quinzième siècle sur les formes architectoniques du gothique chiaramontano se greffent des motifs catalans qui
luisent d’une originale expression artistique à elle. Matteo Carnelivari, architecte de Noto, travaille intensément à Palerme à la construction d’édifices
monumentaux. On lui doit des créations telles que le palais Abatellis, siège aujourd’hui de la Galerie Régionale de la Sicile (1488), le palais Aiutamicristo (1490)
et l’église S. Maria della Catena, érigée à la fin du quinzième siècle.
C’est le siècle du plus grand peintre sicilien Antonello de Messine (1430-1479), ses premières oeuvres sont exposées dans les galeries et musées les plus
importants d’Europe et d’Amérique. A Palerme dans la Galerie Régionale est exposée une des oeuvres les plus significatives de ce grand artiste, le magnifique
tableau de la Vierge “Annunziata” daté par Brunelli à 1474 et plusieurs autres oeuvres mineures. Contemporains d’Antonello sont le grand sculpteur Domenico Gagini,
souche d’une famille qui laisse des chefs-d’œuvre d’art dans toute la Sicile et Francesco Laurana, architecte et sculpteur, auquel on doit la chapelle Mastrantonio
dans l’église romane S. Francesco et dans la Galerie Régionale on peut admirer le buste de marbre d’Éléonore d’Aragon, chef-d’œuvre de valeur sculpturale
raffinée. Au seizième siècle travaille à Palerme un groupe compact d’artistes qui reprennent bien que tardivement le classicisme Renaissance. Antonello Gagini
(1478-1536) en 1531 fait le plan de la construction de l’église S. Maria di Porto Salvo. D’autres remarquables témoignages de la Renaissance, sont l’église S.
Maria dei Miracoli, attribuée à Fazio Gagini et S. Giorgio dei Genovesi par Giorgio di Faccio. Même durant les siècles suivants et jusqu’au XIX~ siècle, Palerme
continue à être un immense chantier de monumentales réalisations artistiques. C’est l’époque de l’histoire architectonique du baroque et cette expression de l’art
est celle qui caractérise le plus la ville aujourd’hui au cœur de la cité, comme couronnement des plus anciens superbes monuments. Les visiteurs plus attentifs, en
visitant Palerme, pourront découvrir la réalité d’un des centres européens de civilisation, d’art et d’histoire les plus importants.
La cathédrale de Palerme
Contrairement à la Cathédrale de Monréale qui est magnifique à l'intérieur et "sans intérêt" à l'extérieur, tout se passe à l'extérieur pour celle de Palerme.